Bonjour !

Je suis écrivain et scénariste de BD.
Mon premier livre est sorti en 2009. Depuis, j'en ai sorti 22 autres... Je travaille aussi pour le ciné, la télé, le jeu vidéo, les applications et même le jeu de plateau.
Car pour toutes ces créations, il y a besoin d'écrire. Donc j'écris. Depuis le temps que j'en rêvais !

Et pourtant bien souvent je l'entends, cette question étrange : "Et sinon, vous avez un vrai métier ?".
Elle me fait un drôle d'effet et je n'ai pas encore trouvé comment y répondre... Alors ce blog va servir à ça : à essayer d'expliquer que oui, écrivain et scénariste, c'est un métier, un vrai.

lundi 3 octobre 2016

Les auteurs de BD sont des héros !

Ben oui. C'est pas moi qui le dit, c'est Jack Lang. Pour vous dire que c'est pas un truc jeté en l'air comme ça, juste pour faire une petite phrase. Non, non, c'est du sérieux !


Voilà ce qu'il a déclaré. C'était la semaine passée, à Angoulême, où avaient lieu les rencontres nationales de la BD. Laissez moi vous expliquer un peu le truc.

Les gars, on va faire un truc formidable !

Il y a quelque temps, les chefs de le Cité Internationale de la BD nous annonçaient qu'allaient avoir lieu à Angoulême les rencontres nationales de la bd. Super. Encore plus super, les auteurs allaient être au centre de toute cette affaire et, cerise sur le gâteau, devinez qui allait venir pour l'occasion ? 
Hé oui !!! Jack Lang ! Jack Lang en personne ! Ça leur mettait des étoiles dans les yeux rien que de prononcer ce nom.
Un truc de fou.

Nous, les auteurs, ça nous a laissé un peu froid au début. Mais très vite nous avons réalisé que ça nous ouvrait effectivement les portes d'un monde merveilleux : celui du calembour nul.

Nous avons donc commencé avec Jack Langoulême, continué avec Jack Langoisse et terminé avec  un Jack Langoustine bien senti. L'ancien ministre ne nous en voudra pas, j'espère. C'est que nous sommes de grands enfants et puis je pense qu'il a entendu ce genre de trucs pourris pendant toute sa jeunesse...

Donc, ces rencontres, ça allait se tenir fin septembre, du mercredi au vendredi et ça serait plein de conférences passionnantes. Alors nous on s'est dit : vivement fin septembre ! Ça va être tellement bien de louper trois jours de boulot pour causer des problèmes du métier !

Mercredi 28 septembre, 11 h 45

On attend Jack dans le vaisseau Moebius (Oui, parce que le bâtiment principal de la Cité Internationale de la BD d'Angoulême, ça s'appelle le vaisseau Moebius, ça en jette, non ?). On cause à des journalistes tout excités. Je parle dans le micro de France Bleue ce qui me donne l'impression fugace d'être Joann Sfar.

Mais voilà que l'ancien ministre arrive en taxi. Il arrive, donc, serre les pognes, dit un petit mot sympa à chacun, cause dans des micros (mais lui ça ne lui donne pas d'impression particulière) et voilà, voilà, les rencontres, c'est parti.

Benoit Préteseille, auteur de bd avec Jack Lang. Au second plan, Samuel Cazenave premier adjoint au maire et Pierre Lungheretti, directeur de la cité de la bd. (photo Renaud Joubert pour la Charente Libre)

Mercredi 28 septembre, 14h30

C'est la première conférence à la salle Némo (oui, tous les trucs ici ont des noms géniaux), la salle principale du ciné d'art et d'essai de la Cité. 
Ça va être bien puisque Denis Bajram, Benoit Peeters et Valérie Mangin vont nous causer des derniers travaux des "Etats généraux de la BD". Ils font des choses formidables, un vrai état des lieux de la profession, une vraie réflexion, des choses indispensables et utiles. 

Il y a environ 150 personnes dans la salle qui ont hâte de les écouter.
Mais d'abord, faut ouvrir le truc. C'est la plaie, mais c'est comme ça. Dès qu'une manifestation se veut un peu importante, il faut que chacun y aille de son petit discours.

Là, on en a eu 7 ou 8 (je sais plus parce que j'ai peut-être été déconnecté à un moment...). Jack Lang a parlé le dernier et bon dieu, il a du métier ! Il cause tellement bien qu'on se demande quand même pourquoi les auteurs sont dans une si mauvaise situation alors que lui a plein d'idées depuis 35 ans pour que tout aille pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais bon...

Mercredi 28 septembre, 15h30

La conférence commence enfin. 
On n'est plus qu'une centaine dans la salle. Plein de gens sont partis, dont Jack. Il a autre chose à faire, bien sûr. Et tous les autres politiques (ou presque tous) sont partis aussi. Ces gens sont sur-occupés que voulez-vous.

Du coup, on est entre nous. On a beau être sur-occupés nous aussi, on a décidé de rester. On écoute. Il se dit plein de choses intéressantes. On s'inquiète bien sûr, malgré les 7 ou 8 discours qui nous ont assuré qu'une pluie de pognon, d'aides et d'actions vachement super allait être déversée dans le petit monde de la bd.

On s'inquiète, mais on espère. parce que des idées, on en a, parce que se battre, on en a l'habitude. Il faut juste qu'on soit ensemble. 
Ça va le faire. Soyons optimistes.

Denis Bajram, Valérie Mangin et Benoit Peeters présentent les derniers travaux des EGBD. La médiatrice (à gauche) est Pili Munoz, directrice de la Maison des Auteurs à Angoulême. (et je ne sais pas qui a pris cette photo, désolé)

Et puis ça a duré 3 jours

Je ne vais pas vous détailler les conférences, d'autant que je n'ai pas assisté à toutes (la maison d'édition dont je m'occupe sortait un bouquin mercredi, donc y'avait du boulot !), mais c'était vraiment intéressant et vraiment utile, ces trois petits jours. Utile pour faire avancer l'état des lieux, utile pour commencer à esquisser des solutions, à échafauder des plans de  bataille...

Et c'est là la prochaine étape : les trouver nous même, ces solutions, sans espérer outre mesure des politiques et des institutionnels. Les mettre en œuvre ensuite, ensemble, avec tout l'enthousiasme qui nous reste. Parce que ce métier, on l'aime et parce qu'on ne veut pas mourir.

Merci à la Cité d'avoir organisé tout ça (chapeau pour la terrible soirée cognac du jeudi soir !), merci à tous les intervenants, merci particulièrement aux trois des États Généraux de la BD, merci à tous ceux qui ont assisté aux conférences. 
Et il faudra refaire ça l'année prochaine. Avec peut être moins de discours, mais toujours une soirée cognac.

Mais revenons à cette histoire de héros !

Oui parce que je vous ai parlé de plein de trucs qui n'ont rien à voir avec le titre de cet article et il est temps d'y revenir. 
Monsieur Jack Lang a donc déclaré mercredi :

"Les auteurs de BD sont héroïques, avec un incroyable dévouement à leur art. Leur rémunération n'est pas à la hauteur de leur talent et de leurs créations"

Nous sommes donc des héros. Les gens ont toujours besoin de héros. Ça les fait rêver. Mais les mots de Jack m'ont fait penser à d'autres mots, écrits par un écrivain que j'adore : Jean Giono.

"Le héros n'est pas celui qui se précipite dans une belle mort, c'est celui qui se compose une belle vie."

Alors, messieurs les politiques qui avez prononcé vos discours et puis êtes sortis de la salle sans daigner perdre votre temps pour nous écouter, oui nous sommes des héros.

Mais ne vous en déplaise, nous serons de ces héros dont parle Giono. 
Des héros vivants