Bonjour !

Je suis écrivain et scénariste de BD.
Mon premier livre est sorti en 2009. Depuis, j'en ai sorti 22 autres... Je travaille aussi pour le ciné, la télé, le jeu vidéo, les applications et même le jeu de plateau.
Car pour toutes ces créations, il y a besoin d'écrire. Donc j'écris. Depuis le temps que j'en rêvais !

Et pourtant bien souvent je l'entends, cette question étrange : "Et sinon, vous avez un vrai métier ?".
Elle me fait un drôle d'effet et je n'ai pas encore trouvé comment y répondre... Alors ce blog va servir à ça : à essayer d'expliquer que oui, écrivain et scénariste, c'est un métier, un vrai.

vendredi 28 novembre 2014

Marche ou crève...

Voilà à quoi va ressembler la bd de demain, si ça continue :


L'affiche du SNAC BD annonçant la marche des auteurs lors du prochain festival d'Angoulême
Des cases vides, voire plus de cases du tout. Plus de dessins en tous cas, puisque les dessinateurs et les illustrateurs sont les plus menacés car les moins à même de trouver le temps de réaliser des travaux annexes afin d'arrondir les fins de mois.

Comment gagner sa vie ?

En effet aujourd'hui les avances sur droits sont loin de couvrir le temps de réalisation d'une BD ou d'un album illustré. Et comment compter sur des droits d'auteur alors que les chiffres de vente par album baissent sans cesse, que la durée de vie des livres dans les rayons est de plus en plus courte, que le nombre de bouquins distribué gratuitement devient phénoménal et qu'un nombre de plus en plus considérable d'exemplaires passe au pilon ou chez les soldeurs ?

Bref, comment gagner sa vie d'auteur aujourd'hui à l'heure où les avances sur droits et les pourcentages sont à la baisse et où les charges sociales sont à la hausse ?
Que faire pour que ceux qui créent, ceux qui sont à la base de tout dans cette chaine du livre multi milliardaire puissent vivre décemment ?

Hé bien, il semble bien que personne n'ait la solution...

Alors les auteurs de tous les secteurs se mobilisent, et particulièrement ceux de la BD et du livre jeunesse. Action au festival Quai des Bulles à Saint Malo, prise de parole au festival BdBoum de Blois, actions diverses au festival du livre jeunesse de Montreuil, d'autres interventions dans des festivals moins visités et moins prestigieux.
Les auteurs en action au salon du livre jeunesse de Montreuil
Tous ces mouvements sont partis de l'annonce du futur changement de régime de notre retraite complémentaire. On nous a entendu (un peu) et la réforme est suspendue afin de laisser la place à des consultations et à des négociations.
C'est bien. Mais le mal est plus profond que cela. Si vous lisez régulièrement ce blog, vous le savez déjà. Sinon, je vous invite à vous pencher sur quelques uns de mes articles.

Le mal est profond. 

Très profond. Alors c'est toute une population de travailleurs pauvres qui tente de s'unir grâce à ses syndicats (SNAC BD, Charte des auteurs et illustrateurs, etc.). Et ceux qui s'en sortent mieux, et les stars de la profession se rangent à leurs côtés. Nous sommes tous ensemble.
C'est une foule de gens qui aiment leurs métiers (écrivains, scénaristes, dessinateurs, illustrateurs, coloristes...) qui se lève et qui crie sa détresse. 
Ces gens là travaillent. Produisent.
Leur travail rapporte une masse considérable d'argent et il fait vivre pas mal de catégories d'employés*: ceux des imprimeurs, des éditeurs, des diffuseurs, des distributeurs, des transporteurs, des librairies, des bibliothèques, des salons et des festivals, des nombreuses structures d'état ou des territoires qui s'occupent du livre.

Leur travail allume des étoiles dans les yeux des lecteurs (pas toujours, bien sûr, mais ça arrive plus souvent qu'on croit). Leur travail n'est pas si futile. Il fait réfléchir et penser, il permet d'apprendre, il fait grandir...
Leur travail est une richesse culturelle.

*Le livre, première industrie culturelle, c'est 4 milliards d'euros par an et 80.000 emplois

 

Ces gens là ne veulent pas que leur travail disparaisse...

Alors au festival d'Angoulême, pour la grand messe de la BD, ils vont organiser une marche. 
J'espère qu'ils seront nombreux. J'espère qu'ils pourront se faire entendre. J'espère qu'il fera beau ; froid, parce qu'on sera fin janvier, mais avec un franc soleil d'hiver bien agréable.

J'espère qu'on les prendra au sérieux. J'espère qu'on se rendra compte qu'ils sont importants. J'espère qu'on se rendra compte qu'ils sont indispensables. J'espère qu'on trouvera le moyen de les sauver.

Et si cette marche et toutes ces actions n'aboutissent pas, il ne restera plus qu'à écrire le dernier livre, qu'à dessiner la dernière BD, qu'à illustrer le tout dernier album pour les petits : l'histoire drôle et tragique à la fois de ce bûcheron si sûr de lui mais un peu idiot qui scie la branche sur laquelle il est assis.